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NEWS ACA-CRL / Le groupe Dubreuil ne mariera pas Corsair à sa compagnie Air Caraïbes.

Air Caraïbes Atlantique

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Le reproche fait à Marc Rochet, le patron d’Air Caraïbes et bras droit de Jean-Paul Dubreuil pour cette activité ? Avoir affiché la couleur en osant parler d’efforts de productivité. Et quand le repreneur vendéen a refusé de payer la facture des grèves épidermiques liées à ces annonces, le groupe TUI, qui s’était déjà engagé à recapitaliser sa filiale à hauteur de 17 millions d’euros avant de s’en débarrasser en juin, a préféré opérer un demi-tour serré sur l’aile.

ENQUÊTE Dubreuil, un empire familial si discret :

Le groupe Dubreuil ne mariera pas Corsair à sa compagnie Air Caraïbes. Un échec inhabituel pour l’entreprise familiale de l’Ouest, diversifiée comme jamais, qui n’a guère l’habitude d’être éconduite de la sorte.

Il a vendu à l’Elysée un Airbus A330 de onze ans d’âge devenu – après lourde transformation – le fameux « Air Sarko One », transformé une ancienne clinique de bonnes sœurs en hôtel Mercure dans son fief de La Roche-sur-Yon. Il s’est hissé dans le Top 5 des concessionnaires Peugeot en France et a inauguré plus récemment un centre hippique dans la petite bourgade dont il est maire, à Sainte-Foy, près des Sables-d’Olonne. A soixante-douze ans, Jean-Paul Dubreuil, qui pilote toujours son Beechcraft quand l’occasion se présente, peut se flatter d’avoir plutôt bien mené sa carrière de patron touche-à-tout : désormais classé 202e fortune française, selon le classement de « Challenges », il a largement fait fructifier le groupe dont il avait hérité à vingt-quatre ans, après le décès brutal de son père. Un groupe dont il a modifié la gouvernance dès 2009 pour, à son tour, céder les commandes à ses trois enfants, Paul-Henri, le président du directoire, et Sophie et Valérie, toutes deux directrices générales.

Mais, depuis le 5 mars dernier, le climat est plus lourd dans le clan vendéen. Véritable coup de tonnerre dans un ciel serein, le géant allemand du tourisme TUI a décidé à la surprise générale de ne plus lui céder sa compagnie aérienne Corsair… quelques jours à peine après les comités d’entreprise et la conférence de presse commune, qui avaient officialisé ses fiançailles avec Air Caraïbes, la compagnie long-courrier du groupe Dubreuil. Une ultime rebuffade liée à une incompréhension profonde côté Corsair, qui ne coûte peut-être rien financièrement au premier groupe vendéen, mais écorne la belle saga familiale de ce « groupe d’épiciers », où l’on apprend dès son plus jeune âge à faire confiance à son intuition et à stimuler son « esprit entrepreneurial ». Munis de quelques actions en poche, les enfants de la fratrie et des cousins Dubreuil ont même le droit d’assister en spectateurs aux assemblées générales dès l’âge de 7 ans, pour se familiariser avec le capitalisme familial !

Envolé d’un trait de plume, le projet de créer le « premier pôle aérien privé 100 % français », face au mastodonte Air France : un ensemble désormais virtuel de 2 marques, 15 avions, autant de destinations qui fleurent bon les vacances, et 2,4 millions de passagers annuels. Un échec qui renvoie à 1998-1999, lorsque British Airways avait abandonné son projet d’édifier lui aussi le fameux « second pôle aérien français », en mettant bout à bout TAT et les restes d’Air Liberté.

Un beau gâchis à la française

Coup d’arrêt d’autant plus marquant qu’il concerne le vrai dada du chef du clan familial, l’aérien. Quiconque s’intéresse au groupe Dubreuil sait que Jean-Paul a décroché son brevet de pilote à dix-sept ans, avant son permis de conduire. Et que, s’il se défend de « perturber l’opérationnel », il garde un droit de regard sur les sujets lourds comme les achats d’Airbus.

L’échec sur Corsair, simple question de méthode ? A entendre les arguments des uns et des autres, on se demande comment les deux parties ont pu rédiger ne serait-ce qu’un protocole d’accord. « On nous a vendu tout ça brut de décoffrage, sans explication ni clarification. La transformation de l’activité des escales et de la maintenance posait un vrai problème juridique et masquait un désengagement à terme. Nous avons eu un premier CE avec le groupe Dubreuil le 19 février, mais au second, le 26, il n’y avait plus un seul représentant, ils n’ont répondu à aucune question », dénonce un salarié chez Corsair.

Un beau gâchis à la française, où la compagnie qui gagne de l’argent régulièrement, a triplé son chiffre d’affaires en quelques années et dispose d’un portefeuille de 9 long-courriers A350 en commande ne peut aider sa voisine à rééquilibrer ses comptes (Corsair aurait accumulé 450 millions de pertes en dix ans). Ni la faire profiter de son plan de développement, barrée d’entrée de jeu par une image de prédateur sans scrupule. « Ils ont voulu aller à un train d’enfer et procéder comme si les choses étaient déjà faites. Ça fait quatre fois que le groupe Dubreuil s’intéresse à nous et à chaque fois ils reculent au dernier moment », poursuit un proche du dossier. Le reproche fait à Marc Rochet, le patron d’Air Caraïbes et bras droit de Jean-Paul Dubreuil pour cette activité ? Avoir affiché la couleur en osant parler d’efforts de productivité. Et quand le repreneur vendéen a refusé de payer la facture des grèves épidermiques liées à ces annonces, le groupe TUI, qui s’était déjà engagé à recapitaliser sa filiale à hauteur de 17 millions d’euros avant de s’en débarrasser en juin, a préféré opérer un demi-tour serré sur l’aile.

Hyperactif patriarche

Une gestion finalement bien brouillonne pour ce rapprochement qui paraissait, sur le papier, des plus logiques. Et un impair qui cadre mal avec la réputation de l’hyperactif patriarche, qui compte un solide réseau d’amitiés au sud de Nantes. « Jean-Paul Dubreuil ? C’est l’esprit d’entreprise, caractéristique des hommes de l’Ouest, il agit sans bruit mais avec détermination. Une vraie capacité à développer et pérenniser cette très belle saga familiale. Ce groupe a rarement eu des difficultés dans ses principaux métiers », saluait, juste avant ce premier revers, ­Jacques Auxiette, président (PS) du Conseil régional des Pays de la Loire et ancien maire de La Roche-sur-Yon, qui eut l’occasion de marier l’une de ses filles.

« Jean-Paul, c’est le rayonnement discret des groupes familiaux. Une capacité fantastique à transformer ce qu’il fait en réussite, et à changer les opportunités en stratégie », renchérit Serge Papin, président de Système U, un natif de la région, qui connaît aussi bien le père que le fils, leur groupe comptant deux grandes surfaces aux couleurs des Nouveaux Commerçants depuis quatre décennies. « Il appartient à une génération où les chefs d’entreprise se sont pris en main à partir de leur terroir, de leurs équipes, et ont su se développer à partir de ça, à l’image des Fleury Michon, Bénéteau, Gautier (meubles)… »

De tout cela résulte un groupe assez singulier où le métier d’origine, la distribution alimentaire, ne représente plus que 5 % du chiffre d’affaires (sur un total de 1,43 milliard d’euros), et se résume à deux Hyper U et un Flunch. Des deux métiers hérités de son père Henri (le commerce alimentaire de gros et la distribution de carburant dans les zones rurales), Jean-Paul a poussé le curseur jusqu’à huit, sans chercher de points communs entre eux : concessions automobiles, transport aérien, hôtellerie, matériel de TP, panneaux solaires, distribution de lubrifiants, vente de matériel agricole… Avec un prisme de commerçant-gestionnaire. « Nous sommes des épiciers et des “centimiers”, habitués à travailler avec des marges réduites », s’est expliqué Paul-Henri dans les colonnes du magazine spécialisé « Auto Infos ». Une politique qui ne fonctionne pas si mal, puisque le groupe volontairement très régional, galaxie de grosses PME, emploie près de 3.500 salariés, a vu son chiffre d’affaires grimper de 38 % depuis les turbulences de 2009 et affiche une marge globale de 3,5 %. A ce jour, le holding familial dispose d’un trésor de guerre de 290 millions d’euros.

Décollage de l’avion-taxi

Ce profil volontairement diversifié a pris tournure dès les années 1970, lorsque Jean-Paul a décidé d’allier l’utile à l’agréable. Collant à la mutation rapide de la distribution hexagonale, il apporte ses deux points de vente de Luçon et des Sables-d’Olonne au groupe Disco. Ces activités engendrent de fastidieux déplacements en train dans toute la France, aussi le jeune patron se rapproche-t-il de deux copains chefs d’entreprise dans la menuiserie-ameublement, Gilles Cougnaud et Michel Gautier, pour partager un petit monomoteur. Ce sera la création d’Air Vendée, simple firme d’avion-taxi, puis rapidement compagnie régulière (1979), pour rallier l’île d’Yeu depuis Nantes et La Roche-sur-Yon. «  Jean-Paul a toujours eu son avion, c’est une espèce de modernité avant l’heure. Mais ce n’est pas qu’une histoire de business, il a vraiment ça en lui », commente Serge Papin. Très vite viendra ensuite la ligne régulière sur Orly. « C’est sûr que ça secouait un peu », se souvient Jacques Auxiette, qui sera sollicité alors par le « serial entrepreneur » pour financer un hangar et surtout le système d’atterrissage tout temps (ILS) du terrain de La Roche-sur-Yon.

Chez les Dubreuil, le virus du manche à balai était assurément plus fort que celui des têtes de gondole. Au point que le drame qui a frappé la famille en 1998, le décès de son frère Michel sur son appareil de voltige Mustang P-51, n’a dissuadé personne de voler. Pas même ses propres fils, Sébastien et François (les neveux de Jean-Paul), aujourd’hui quarantenaires et à la tête d’une compagnie d’aviation d’affaires, qui propose également baptêmes de voltige ou vol à voile, toujours sur le même aérodrome local.

C’était l’époque bénie, mais pas éternelle, jusqu’à la fin des années 1980, où le « réseau Datar » comptait au total jusqu’à 184 lignes subventionnées, y compris sur l’Europe depuis la province. Air Vendée servira alors de creuset à Regional Airlines, une compagnie plus ambitieuse surtout destinée aux hommes d’affaires, qui prospérera gentiment à partir de son hub de correspondance de Clermont-Ferrand ; Jean-Paul Dubreuil saura le vendre en 2000 à Air France, pour 61 millions d’euros, lorsque les résultats commençaient à flancher. Viendra ensuite le redéploiement vers les Antilles, avec les rachats en rafale de trois petits transporteurs moribonds, Air Caraïbes, Air Guadeloupe et Air Martinique, unis pour s’attaquer au boulevard Orly-Antilles en 2003.

Peugeot, sinon rien

Moins de péripéties dans l’automobile, un autre secteur clef. Mais une image bien ancrée dans sa zone de chalandise, établie de proche en proche (Vendée, Charente-Maritime, Maine-et-Loire, etc.) à partir de 1985. Sur cette activité minée, où les marges sont traditionnellement faibles, « les Dubreuil sont sans doute les distributeurs les plus originaux de France, et parmi les 10 plus performants », explique un connaisseur du secteur. Sa singularité par rapport à tous ses concurrents multimarques : être fidèle uniquement à la marque Peugeot, avec ­17 concessions du lion. « Aujourd’hui, nous sommes le troisième investisseur de Peugeot en France pour les véhicules neufs. Notre but, ce n’est pas la course au chiffre d’affaires, c’est de rester dans le premier tiers leader parmi différents critères de performance. C’est vrai que, à une époque récente, on s’est posé des questions sur l’avenir du groupe PSA, mais on leur a maintenu notre confiance et, surtout, on compense des bas de cycle par nos autres métiers », explique Paul-Henri Dubreuil, plus bavard sur l’automobile que sur l’aérien…

Au-delà des ventes de voitures neuves, peu rémunératrices, l’auto lui donne l’occasion développer des structures complémentaires dans le grand Ouest, génératrices de valeur ajoutée: vente de véhicules d’occasion aux professionnels, démontage des voitures en fin de vie, distribution de pièces détachées Peugeot pour les réparateurs indépendants, etc. Et, si un business ne décolle pas, « nous savons désinvestir », ajoute le patron : les locations de voitures Rent A Car, les centres auto Feu Vert, et dans un autre domaine des magasins Mr Bricolage, autant d’enseignes larguées en route par le passé. « On a toujours jugé ce groupe un peu hétérogène, en fait ils mettent de la cohérence dans la multiplicité de leurs métiers », analyse le patron de Système U, Serge Papin. Exemple type, «  dans des pôles différents comme l’automobile, le matériel de TP ou le matériel agricole, il y a des synergies à mettre en place, par exemple sur nos sites Internet », souligne Paul-Henri Dubreuil, pas très chaud pour une nouvelle diversification. Une manière de dire que le ciel de Corsair peut attendre ?

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