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NEWS AF / Interview Alexandre de jugnac : les ECHOS

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« Soit nous nous réformons, soit nous déclinons »Le PDG d’Air France-KLM, Alexandre de Juniac, lancera le 16 mars prochain la renégociation avec les syndicats des conventions sociales chez Air France comme chez KLM.
Après de nouvelles pertes en 2014, vous avez annoncé le renforcement des réductions de coûts pour la période 2015-2017. A quoi a donc servi le précédent plan de restructuration Transform?

S’il fallait résumer le plan Transform 2015 en peu de mots, je dirais que nous avons sauvé le groupe. Il faut se rappeler dans quelle situation nous étions, avec un endettement de 6,5 milliards d’euros multiplié par trois en quatre ans, des pertes qui se creusaient et un produit qui accusait un sérieux retard sur la concurrence. Avec Transform, nous avons complètement inversé la tendance. Sans la grève, Air France-KLM aurait dégagé 300 millions d’euros de bénéfices. Intrinsèquement, nous sommes donc redevenus bénéficiaires, grâce aux efforts considérables fournis par les salariés. Nous avons réduit la dette d’un peu plus de 1 milliard. Et nous avons lancé les nouveaux produits, qui nous ont permis de revenir dans le peloton de tête des meilleures compagnies mondiales. Les taux de satisfaction ont quasiment doublé. L’objectif 2015 est d’avoir un résultat positif pour Air France, comme pour Air France-KLM. Et maintenant que nous avons remis la compagnie sur le chemin de la rentabilité, nous pouvons passer à l’étape suivante avec le plan Perform 2020, qui sera celui de la reconquête, même s’il comportera aussi un volet important de poursuite de réduction des coûts.

Tous les objectifs du plan Transform n’ont toutefois pas été atteints, notamment chez les pilotes…

Les pilotes n’ont pas encore mis en œuvre la totalité des mesures d’économies sur lesquelles leur syndicat s’était pourtant engagé dans l’accord signé en 2012. Nous sommes en discussion avec eux pour l’application de la totalité de ces mesures. Je souhaiterais cependant souligner les efforts sans précédent déjà réalisés par les pilotes depuis 2007 pour revisiter complètement leur métier et la sécurité des vols. Dans une compagnie aérienne, les pilotes doivent être les leaders du changement.

En quoi va consister ce volet d’amélioration de la compétitivité du plan Perform ?

En septembre dernier, nous avons exposé notre stratégie, accueillie très favorablement, qui consiste à aller chercher la croissance là où elle se trouve, notamment en Asie avec des partenaires, sur le marché loisir avec Transavia et dans la maintenance. L’ambition d’Air France-KLM est de renforcer sa position de géant mondial à ancrage européen, à travers des partenariats avec quelques compagnies de taille comparable, qui seront d’un côté Delta, de l’autre, trois ou quatre compagnies asiatiques du même calibre, sachant que l’Asie va du nord du Japon au sud du Yemen. Mais pour y parvenir et pouvoir financer notre développement, nous devons encore améliorer notre compétitivité et résorber les écarts de coûts avec nos principaux concurrents. Tout l’objet de la négociation avec les organisations syndicales sera donc de bâtir de nouveaux accords chez Air France comme chez KLM, qui permettront de résorber ces écarts.

Le plan transform n’a donc pas permis de résorber les écarts de compétitivité ?

Transform a permis de réduire ces écarts, mais il reste du travail à faire. On ne s’en cache pas, puisque nous avons distribué à tous les salariés les résultats d’études comparatives (benchmarks) de nos coûts et de ceux de nos concurrents. Les écarts de coûts sont très variables selon les catégories de personnels et les secteurs. C’est pourquoi nous voulons désormais procéder activité par activité et non plus de manière homogène, en fonction de la position compétitive de chaque secteur.

Contrairement au plan Transform, qui fixait un objectif de 20% pour tous, les efforts demandés seront donc différents selon les catégories de personnels ?

Les efforts à réaliser ne seront pas nécessairement définis par catégorie de personnels mais par activité. Ils varieront selon la situation compétitive de chacune et ils ne seront pas de même nature. Cela nous parait plus conforme à la réalité économique qu’un objectif unique pour tous, et plus mobilisateur pour les salariés, qui seront les maîtres d’œuvre de ces transformations. C’est pour cela que nous avons lancé une procédure « bottom-up » de consultation auprès de l’ensemble de nos 100.000 salariés, à qui nous avons demandé de nous transmettre leurs propositions de réformes. Nous avons des taux de retour impressionants et des réponses très intéressantes.

Au global, l’intensité des efforts demandés sera-t-elle comparable à celle de Transform ?

Sur les cinq ans du plan Perform [de 2015 à 2020, NDLR], l’effort sera probablement du même ordre. Mais à la différence de Transform, ce sera pour financer la croissance. Nous n’avons guère le choix. C’est soit la réforme, soit le déclin. Le transport aérien est aujourd’hui un monde de géants, où la taille du réseau et de la flotte font la différence. Les compagnies du Golfe sont des géants qui n’existaient pas il y a quinze ans. Les compagnies chinoises vont le devenir. Les compagnies américaines sont revenues au premier rang mondial. Et en Europe, Ryanair transporte autant de passagers qu’Air France-KLM. Soit nous nous réformons avec Perform pour rester en première division, soit nous déclinons. Et il n’y a pas de place dans l’aérien pour les joueurs de seconde division. L’immobilisme, ça serait la relégation assurée. Je sais que les salariés en sont absolument convaincus.

Quel est le calendrier de ce nouveau plan ?

Avec Pieter Elbers, j’ai déjà lancé les négociations chez KLM, où les accords d’entreprises arrivaient à leur terme. Chez Air France, elles démarreront au lendemain des élections des représentants du personnel, qui s’achèvent le 12 mars. Ces élections sont capitales, je souhaite la participation la plus large possible. C’est avec les syndicats issus de ce vote que nous bâtirons l’avenir d’Air France. Avec Frédéric Gagey, je convierai dès lundi prochain tous les syndicats qui seront désignés comme représentatifs à une réunion stratégique et sociale afin de commencer à élaborer les mesures nécessaires. Tout le monde apportera sa pierre à l’édifice. Les négociations entreront dans leur phase technique dans la deuxième quinzaine d’avril, une fois constitués les nouveaux comités d’entreprise. L’objectif est de parvenir à signer les premiers accords vers la fin de l’été, en septembre, pour une mise en œuvre sur les années suivantes.

Les réductions d’effectifs vont-elles se poursuivre ?

Nous allons examiner, pour chaque activité, les besoins en effectifs pour les prochaines années. Ces besoins peuvent évoluer très vite. Ainsi, chez les pilotes, nous avions identifié un sureffectif qui s’est résorbé notamment grâce au développement de Transavia. A l’inverse, les mesures de productivité qui découleront des accords peuvent générer des sureffectifs. Nous devons donc regarder tout cela dans le détail, secteur par secteur, avec les organisations syndicales. Mais les rumeurs de suppressions d’emplois massives qui ont circulé sont totalement infondées et nous n’avons aucun plan secret de licenciements. Nous continuerons à appliquer les mêmes méthodes qui ont fait la preuve de leur efficacité lors du plan Transform, sans drame social.

Certains représentants syndicaux vous accusent néanmoins de vouloir remettre en question les acquis sociaux sur la base de déclarations lors d’un colloque.

On a complètement déformé mes propos, en faisant des coupes dans mes déclarations. Ce n’est pas acceptable. Je suis profondément convaincu que la première richesse d’une entreprise, ce sont ses salariés. Le sujet du colloque était « Les acquis sociaux et la mondialisation » et tout le sens de mon propos était de dire qu’il faut trouver le bon compromis entre la préservation des acquis sociaux et la compétitivité de l’entreprise. Nous sommes dans une compétition mondiale dans laquelle nos compétiteurs ne suivent pas les mêmes règles sociales. Nous nous battons contre cet état de fait en allant voir les pouvoirs publics français et européens pour leur demander d’égaliser les conditions de concurrence. C’est ce que j’ai d’ailleurs fait en allant à Bruxelles, avec mon collègue de Lufthansa, Carsten Spohr, en janvier dernier, pour y rencontrer la commissaire aux Transports. Nous mobilisons également un certain nombre de pays européens pour qu’ils établissent des règles du jeu homogènes.

Cela consiste-t-il à refuser des droits de trafic supplémentaires aux compagnies du Golfe ?

Cela consiste avant tout à dire que l’octroi des droits de trafic doit être subordonné à des conditions de concurrence équitable. Nous y sommes bien parvenus en Europe, où les compagnies low cost ont été contraintes d’appliquer des régimes juridiques des pays dans lesquels elles travaillent. Mais ce n’est pas le cas avec les compagnies du Golfe qui bénéficient, par exemple, d’infrastructures aéroportuaires dont le coût est presque entièrement supporté par les finances publiques, alors qu’en Europe, il est intégralement supporté par les compagnies aériennes. Je ne suis pas le seul à le dire. La plupart des compagnies d’Europe continentale partagent la même préoccupation. C’est également le sens de l’action de nos collègues américains, qui sont montés au créneau en publiant un rapport sur les distorsions de concurrence. Le transport aérien n’étant pas régi par les règles de l’Organisation mondiale du commerce, ces problèmes de distorsion de concurrence ne peuvent être réglés qu’au niveau communautaire ou par des traités bilatéraux entre les Etats européens et ceux du Golfe. Beaucoup de pays commencent d’ailleurs à le comprendre.

Les compagnies du Golfe vous accusent de refuser la compétition…

Notre stratégie vis-à-vis des compagnies du Golfe n’est pas uniquement défensive, comme le prouvent nos efforts massifs de montée en gamme. En mettant en ligne nos avions les plus efficaces sur les destinations les plus compétitives, nous sommes bien souvent capables de proposer un meilleur produit à un meilleur prix. La semaine dernière, nous proposions ainsi un Paris-Dubaï (ligne équipée de nos nouvelles cabines) à 408 euros contre 451 euros sur Emirates… Par ailleurs, nous avons aussi un partenariat avec Etihad, que nous souhaiterions développer sur l’Asie du sud – le continent indien – et l’Australie, sous une forme qui pourrait ressembler à notre coentreprise avec Delta.

Les grands aéroport régionaux comptent sur les compagnies du Golfe pour ouvrir des lignes internationales…

La desserte intercontinentale directe des villes de province par des compagnies étrangères est une stratégie extrêmement pénalisante pour le hub d’Air France. Or ce hub de Roissy permet aux voyageurs de province d’accéder au plus grand choix possible de destinations dans le monde entier. Même si cela semble paradoxal, vouloir ouvrir quelques vols directs au détriment du hub de Roissy est un raisonnement qui pénalise in fine les territoires. Le hub de Roissy doit être considéré comme une infrastructure absolument critique pour le pays. Nos amis hollandais l’ont parfaitement compris, en développant une stratégie nationale pour favoriser leur infrastructure aérienne. Je plaide donc pour une stratégie nationale concertée de compétitivité de l’aérien en France, qui inclurait l’ensemble des acteurs.

Pensez-vous pouvoir parvenir à un accord avec Aéroports de Paris sur l’évolution des redevances et des investissements ?

La négociation n’est pas terminée. Soit nous trouvons un accord, soit il y aura un arbitrage ministériel. Mais étant le premier client d’Aéroports de Paris, leur succès sera le nôtre et inversement. La concurrence est mondiale et pas seulement européenne.

Les relations avec KLM se sont visiblement détérioriées. Que s’est-il passé ?

Comprenons de quoi l’on parle : nous sommes l’exemple parfait d’une fusion réussie où les spécificités de chacun respectent la culture de l’autre et créent de la valeur pour tous. Cela fait dix ans qu’Air France et KLM ont fusionné et des dizaines de milliers de salariés dans le groupe travaillent pour Air France et pour KLM. Dans les escales du monde entier, les personnels enfilent une veste bleue marine [Air France, NDLR] ou une veste bleue claire [KLM] en fonction de l’avion qui arrive. Les équipes commerciales sont totalement intégrées, la gestion de la recette et du réseau aussi, de même que le cargo, la maintenance… La construction du groupe depuis dix ans s’est faite de manière un peu paradoxale, en commençant par intégrer les unités opérationnelles, avant les unités fonctionnelles, contrairement à ce qui se fait habituellement dans les fusions-acquisitions. Il faut maintenant se concentrer sur l’essentiel : j’en appelle à la mobilisation de toutes les équipes Air France, KLM et Air France-KLM pour réussir Perform.

On vous entend peu sur la politique économique du gouvernement. Que pensez-vous de la loi Macron ?

Ce n’est pas mon rôle de m’exprimer sur la politique du gouvernement. Mais tout ce qui est bon pour la croissance en France est bon pour Air France. C’est le cas notamment de la loi Macron, qui va contribuer au redémarrage de l’économie.

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